Les vertus de l’enfer

Cette série à pris naissance durant les évènements du printemps arabe. J’étais sensible à cette révolution des peuples qui aspiraient à la liberté et à leur dignité. La colère, la révolte étaient leur unique moteur pour mettre un terme au despotisme régnant. Pour autant je ne voulais pas faire une peinture militante. Trop vu, trop bu de ces gesticulations sans lendemain. L’Histoire va trop vite. Les conflits nous débordent. 

Et toujours Guernica. Le printemps arabe. Nous sommes tous des cibles

 

Le critique d’art Denis Chollet me demanda un court texte sur mon parcours après Mai 68 pour illustrer un chapitre de son ouvrage. Voici ce que je lui écrivais. Vous me faites remonter le temps en me demandant de vous écrire quelques lignes sur l’époque du Garage 103 – un collectif d’artistes Niçois – et de ma participation aux Pour et Contre chez Ben à Saint Pancrace, sur les hauteurs de Nice. Ben nous présenta dans le catalogue de l’exposition À propos de Nice, préfacé par Pontus Hulten lors de l’inauguration de Beaubourg en 1977. Ce sont les années de l’après 1 968. Une queue de comète, la fin des trente glorieuses et l’entrée furtive dans une nouvelle époque, celle du fric, du cynisme, des mirages du libéralisme et de ses catastrophes mondialisées. Une époque des temps nouveaux récupératrice et intelligente que nous percevions mal. Jeunes, toute l’équipe du garage 103 vivait dans l’insouciance et dans la croyance de pouvoir révolutionner tout et rien dans un Monde qui nous semblait plein de possibles. Les paillettes du diable. Nous étions forts en gueule. Pour ma part, Je pensais que l’art pouvait encore faire de la résistance, proposer d’autres comportements, aider à réfléchir sur le Monde et à améliorer nos conditions d’existence. Avec nos faibles moyens nous expérimentions. Nous tâtonnions. Nous cherchions, parfois dans l’excès ou l’emphase le socle de notre écriture. Nous avions cette liberté de pouvoir faire des bides, de rire de nous-mêmes. Dans ce temps-là, j’aimais faire des performances. Feux d’artifice et explosifs au garage 103, casse de téléviseurs sur le parvis du théâtre de Nice avec l’artificier Pierre Alain Hubert pyrotechnicien artiste, concerts Fluxus (symphonie pour un water) au théâtre de Nice, sculptures éphémères dans la nature, mythologies individuelles dans l’atelier de Dominique Angel avec une création musicale –un opéra composé par Dominique Marchal – chanté par huit interprètes et j’en passe. Cette période était propice à une folie de circonstances. Elle était marquée par les atrocités de la guerre du Vietnam et de la débâcle de l’armée américaine, la séparation des blocs Est-Ouest, mère de la guerre froide, par les actions des groupuscules d’extrême gauche comme ceux d’extrême droite, par les brigades rouges, par la bande à Baader. La violence était présente. Nous voulions un autre Monde. C’est dans cet esprit, il me semble, qu’il fallait entrevoir la genèse de notre propre langage et les raisons de nos débordements. Tout au moins, les miens sont collés à cette histoire. Cette mémoire oriente et pose mon regard sur le temps présent des algorithmes et des conséquences de la crise climatique, sanitaire, sociale et politique. L’histoire continue. La vie continue. Lookace Bamber.